top of page

Un petit jeu comme équivalent d’un fantasme - Philippe Lacadée

Une activité énigmatique d’un jeu d’enfant, sans cesse répétée, livre son sens à Freud [1]. Elle illustre comment un enfant peut « se faire le metteur en scène » sur l’Autre scène d’un fantasme.

Si l’énoncé retenu de l’enseignement de Jacques Lacan est « l’inconscient structuré comme un langage », il l’avait déduit de l’œuvre de Freud, notamment de ses textes mettant en évidence l’importance de la chaîne signifiante. Jacques-Alain Miller précise que le retour de Lacan à Freud consiste à intégrer le concept de pulsion de mort [2].

S’il n’intéresse pas les psychanalystes post-freudiens, il y a pourtant la nécessité de le préserver.

En prenant appui sur le texte de Freud Au-delà du principe de plaisir, Jacques-Alain Miller montre que si la vie est régie par le principe de plaisir, l’au-delà du principe de plaisir ouvre lui sur un au-delà de la vie. « L’au-delà de la vie, c’est strictement la chaîne signifiante avec son insistance transbiologique, même prévitale, c’est ce que l’on trouve chez Lacan. » [3] C’est la raison pour laquelle il va insister sur l’essentiel de la répétition en tant qu’elle est une infraction au principe du plaisir.

Avec le concept de répétition, venant faire infraction sur le principe du plaisir, il y a là ce que Lacan nomme l’inertie. C’est sur ce point précis que Lacan fait valoir ce fameux jeu de l’enfant, qui deviendra célèbre sous le nom de jeu du Fort-Da « que l’on pense bien connu, qu’on ne regarde plus dans le détail, qu’on ne regarde plus à partir des différents moments de l’enseignement de Lacan » [4].

 

Fort-Da comme paradigme de l’insistance de la chaîne signifiante

Le jeu du Fort-Da, c’est le jeu du petit enfant qui fait disparaître une bobine avec laquelle il joue, et qu’il ramène au bord de son lit en scandant ce mouvement avec deux mots fort et da. Freud, reconnaissant ce jeu sur le fond de l'absence de la mère, fait valoir à ce moment la prise du symbolique sur l’objet. Là, sa thèse, c’est la dissolution de l’objet dans le signifiant, et le fait que cet objet est soumis à l’alternance Fort-Da. Cet objet est pris dans la dynamique de la paire signifiante. Il y a donc là à la fois le minimum de la paire signifiante S1-S2 et aussi la question de l’objet. Pour Lacan, c’est le paradigme de la puissance signifiante et, pour lui, l’objet est plutôt annulé, et asservi au signifiant. Si l’on peut lui donner un statut à ce petit enfant, d’avant sa prise par ou dans le symbolique, il devient humain, comme le dit Lacan, non par sa propriété naturelle d’être là comme objet vivant, il ne devient humain que par le mouvement de prise dans le signifiant Fort-Da qui l’annule. Lacan dira même que c’est le point 0 du désir, le moment où le désir s’humanise. L’objet étant le serf du signifiant, c’est un objet qui ne vaut que par le signifiant et en tant qu’il est symbolisé.

Ce qu’il faut saisir ici c’est à la fois la place de l’enfant et de son objet, la bobine. D’ailleurs, en français, le mot bobine porte bien cette équivoque. On le reprendra plus en détail, et je vais vous proposer d’être vous-même cette bobine attachée au fil de l’enseignement de Lacan. Car ce que Lacan veut mettre en évidence, dans ce moment de son enseignement, c’est que, ce qui vient contrarier la suprématie de l’insistance signifiante, c’est la fonction d’inertie dont il parle comme d’une fonction imaginaire.

 

Le couple insistance et inertie

Jacques-Alain Miller montre que la fonction d’insistance est mise au premier plan, et que l’inertie n’est même pas située comme faisant couple avec cette insistance. « Les facteurs imaginaires, malgré leur inertie, ne font figure que d’ombres et de reflets. » [5] Isolant alors le couple « insistance et inertie » en tant qu’il parcourt tout l’enseignement de Lacan, il va opposer l’inertie de la fonction du fantasme à l’insistance du symptôme. Il précise que Lacan va reconnaître, dans cette inertie, non pas simplement l’inertie inessentielle du facteur imaginaire, mais une détermination tout à fait essentielle. C’est-à-dire que « l’insistance n’est pas que l’essentiel de la répétition mais aussi bien l’inertie » [6]. L’inertie n’est pas à rapporter à une homéostase imaginaire, mais elle est l’essentiel de ce dont il s’agit dans l’Au-delà du principe de plaisir. Lacan fera alors valoir que l’inertie est de l’ordre de la jouissance.

 

La partie se joue avec l’Autre

Dans le jeu du Fort-Da, la partie se joue avec l’Autre, et elle se joue avec l’Autre maternel, surtout avec l’absence de la mère. C’est avec l’absence que l’enfant joue, il joue avec un autre et un autre qui ne lui prend pas la bobine une fois pour toute. Il est essentiel que l’autre soit à la mesure de l’enfant, si bien qu’on peut aller à l’occasion jusqu’à l’identifier avec la bobine elle-même. Elle lui est utile car il en a un usage de jouissance, elle lui permet de régler sa position dans l’Autre, au sein de l’Autre. Ce jeu se fait sur fond de perte de la mère comme objet primordial, sur le fond d’un certain manque à jouir. Le jeu de la bobine permet au sujet de se faire plaisir dans un moment de détresse, c’est un montage, et on peut y voir l’analogue d’un fantasme. C’est comme l’équivalent d’une phrase, c’est le minimum de la phrase Fort. Dans sa propriété essentielle, elle permet au sujet de se repérer dans son rapport à l’Autre, par rapport au désir de l’Autre. Caractérisé par l’absence de la mère, ce jeu du Fort-Da nous présente la façon dont le sujet s’arrange du désir de l’Autre. « Il s’arrange du désir de l’Autre grâce à un montage et c’est au fond le côté dérisoire d’un fantasme qui passe à l’acte. » [7] C’est avec un objet que le sujet a à sa disposition qu’il parvient à se faire plaisir par rapport à l’angoisse suscitée par le désir de l’Autre. Ce jeu montre très bien ce que dit Lacan : un pied au moins du fantasme est dans l’Autre. Si Freud nous montre que ce jeu se situe par rapport à la mère, on ne peut cependant en faire un absolu, on ne peut pas le détacher de l’Autre. L’enfant qui semble jouer tout seul, précisément joue avec l’Autre. Il joue avec l’absence de l’Autre réel. Il y faut donc la présence de l’ordre du signifiant.

C’est un petit enfant qui est arrivé à une suffisance par rapport à l’angoisse suscitée par l’absence de la mère, grâce à ce petit jeu équivalent d’un fantasme. En effet, ce jeu lui permet de prendre une distance par rapport à sa détresse, c’est la définition même que Lacan donnait du fantasme : « se faire le metteur en scène » [8] lui permet d’annuler, d’oblitérer le fait que, sinon, il n’est que la marionnette du signifiant, la marionnette de l’Autre.

Dans « La direction de la cure », Lacan précise que le fantasme, ça signifie que « le langage lui permet [au sujet] de se considérer comme le machiniste, voire le metteur en scène de toute la capture imaginaire dont il ne serait autrement que la marionnette vivante » [9]. Le jeu du Fort-Da permet ainsi au sujet de se considérer comme le machiniste, le metteur en scène de ce dont il n’est là que la marionnette vivante. Il s’agit là, pour lui, de surmonter un certain laissé tomber de soi-même. On en a le témoignage dans une note que Freud rapporte un jour. La mère de l’enfant étant partie pour plusieurs heures, à son retour, l’enfant l’a accueillie avec ses mots bébé O-O, ce qui était au départ incompréhensible. Mais il s’avéra néanmoins que, pendant cette période de solitude, l’enfant avait trouvé une méthode pour se faire lui-même disparaître. Il avait découvert son reflet, son image, dans un grand miroir qui n’atteignait pas tout à fait le sol, de telle sorte qu’en se couchant par terre, il pouvait faire disparaître son image dans le miroir.

Le fantasme est essentiellement un tempérament de la jouissance, c’est une limite apportée à la jouissance qui serait réglée sur le fantasme, non pas sur le symptôme. Mais le fantasme n’est pas le fin mot de ce dont il s’agit.

 

Une leçon clinique : l’observation de Freud

Dessin du jeu du Fort-Da et de la matrice du fantasme S (barré)<> a

Dessin détaillé permettant de saisir tout le cheminement de Lacan sur le jeu du Fort-Da. [10]

 

 

Suivons ce jeu pas à pas car s’y saisit l’insistance de la chaîne signifiante, puis l’inertie du fantasme et l’insistance du symptôme, enfin, comment Lacan situe ce jeu comme illustration de l’inertie de la répétition. Ainsi, se démontre que la répétition n’est pas que répétition signifiante, elle est aussi répétition de jouissance.

De ce tout premier jeu d’un enfant, que Freud a élevé à la dignité d’un paradigme, Lacan a dégagé des incidences théoriques et cliniques ouvrant des perspectives inédites sur la clinique du signifiant et de l’objet.

En 1920, Freud inventa l’observation analytique de l’enfant à l’atelier du Fort-Da [11], à partir du jeu mis en place par un petit garçon d’un an et demi. Il ne s’agissait pas là d’une observation hâtive, Freud passait plusieurs semaines sous le même toit que l’enfant, son petit-fils, et ses parents, et il s’écoula un certain temps avant que l’activité énigmatique et sans cesse répétée de l’enfant, ne lui livrât son sens.

 

Cette observation est articulée en trois temps :

Premier temps : L’enfant jetait loin de lui tous les petits objets dont il pouvait se saisir, tout en émettant une expression d’intérêt et de satisfaction, un « Oooo » fort et prolongé qui, de l’avis commun de la mère et de l’observateur, n’était pas une interjection mais signifiait Fort c’est-à-dire « parti ». Freud en déduisit qu’il s’agissait d’un jeu et que l’enfant utilisait ses jouets pour jouer à parti.

Second temps : Freud nota par la suite une modification du jeu. L’enfant avait une bobine en bois autour de laquelle était enroulée une ficelle ; il jetait avec adresse cette bobine que retenait la ficelle par-dessus le bord de son lit à rideaux où elle disparaissait, et il assistait à cette disparition en prononçant un « Oooo » riche de sens ; il tirait ensuite sur la ficelle pour rattraper la bobine et saluait sa réapparition par un joyeux « Da » (voilà). C’était là le jeu complet de disparition et retour, présence-absence dont on n’apercevait souvent que le premier acte, inlassablement répété en lui-même, bien qu’il ne fût pas douteux que le plus grand plaisir de l’enfant s’attachât au deuxième acte.

Troisième temps : Freud ajouta aux deux précédentes une observation ultérieure. Un jour où la mère de l’enfant s’était absentée pendant de longues heures, elle fut saluée à son retour par le message « Bébé… Oooo » qui parut d’abord inintelligible. Mais Freud ne tarda pas à s’apercevoir que l’enfant avait trouvé, pendant la longue absence de sa mère, un moyen de se faire disparaître lui-même : il avait découvert son image dans un miroir qui ne descendait pas jusqu’au sol de sorte que, lorsqu’il était accroupi, cette image était « partie ». Lacan vit dans cette observation de Freud un lien : « Au départ de ce développement voici donc liés le Moi primordial comme essentiellement aliéné et le sacrifice primitif comme essentiellement suicidaire : C’est-à-dire la structure fondamentale de la folie [12]. »

 

Pour Freud, ce jeu était en rapport « avec d’importants résultats d’ordre culturel obtenus par l’enfant », du fait d’avoir consenti à un renoncement pulsionnel ; ce qui lui permettait d’accepter le départ de sa mère sans pleurs et sans colère. Lacan parlera de la « première vibration de cette onde stationnaire de renoncements qui va scander l’histoire du développement psychique [13] ». Freud pensait que l’enfant se dédommageait du traumatisme infligé par le départ de sa mère, en mettant en scène lui-même avec ses objets, la présence-absence, puis en faisant monter sur la scène son image spéculaire, son moi – comme si cette image, le moi, « affirme le sujet sous l’aspect de négatif, en ménageant le vide où il trouve sa place [14]. »

 

Un gain de plaisir d’une autre sorte

Le départ de sa mère n’a pas pu être agréable à l’enfant, Freud s’est alors demandé comment concilier avec le principe de plaisir, le fait que l’enfant rejouât cette expérience pénible, et il en proposa deux interprétations. Dans la première, Freud émit l’hypothèse que l’enfant, qui était passif, à la merci de l’événement, s’assurait par une pulsion d’emprise un rôle actif en répétant ce jeu, ce qui lui permettait d’affirmer son indépendance à l’égard du caractère plaisant ou déplaisant du souvenir – cette répétition signifiante venant à la place de la remémoration traumatisante du départ de la mère. Dans la seconde, Freud déchiffra une forme de bravade dans l’action de l’enfant qui, en rejetant l’objet pour qu’il soit parti, satisfaisait une impulsion réprimée dans sa vie quotidienne, celle de se venger de sa mère partie loin de lui ; son action avait une signification de rejet de l’Autre, comme foncièrement inassimilable, et était l’amorce de la symbolisation (ce qui nous donne une piste quant au sens que peut avoir, chez certains sujets, la profération d’injures).

Si Freud a d’abord saisi au travers de ce jeu les deux axes de la répétition signifiante du sujet, et du rejet de l’objet, il eut aussi l’idée que l’enfant, en rejouant une expérience désagréable, tirait malgré tout un « gain de plaisir d’une autre sorte » [15] de cette répétition – c’est ce que Lacan a appelé une jouissance.

 

L’enfant naît au langage

Lacan vit tout d’abord dans l’observation de Freud à l’atelier du Fort-Da, une intuition géniale : « Ce sont ces jeux d’occultation que Freud, en une intuition géniale, a produits à notre regard pour que nous y reconnaissions que le moment où le désir s’humanise est aussi celui où l’enfant naît au langage » [16].

Nous avons à remarquer deux choses dans ce jeu. D’abord que l’enfant s’engage dans le langage par le discours de l’Autre – en reproduisant plus ou moins approximativement les vocables qu’il reçoit de cet Autre ; il le fait dans cet exemple avec le couple de signifiants Fort-Da – ce couple d’opposition fonctionnant comme un battement signifiant « là/pas là » – illustration de la chaîne signifiante réduite ici à son minimum symbolique, comme le souligne Lacan : « Ne l’oubliez jamais, le signifiant n’est pas là pour représenter la signification, bien plutôt est-il là pour compléter les béances d’une signification qui ne signifie rien [17]. » Nous remarquons ensuite que l’enfant s’engage aussi dans le langage avec un objet, la bobine.

Cette observation analytique éclaire quasi expérimentalement l’avènement d’un sujet. L’observation que Freud fit de son petit-fils nous montre comment l’opération du signifiant, l’inscription dans la chaîne signifiante (fort-da) produit un sujet, et comment cela ne va pas sans l’extraction d’un objet. La réalité de l’enfant est supportée d’un objet et d’un jeu – un objeu– qui lui donnent son cadre. Le sujet se sépare d’un objet dont il a la jouissance et cette séparation est logiquement contemporaine de son inscription dans la chaîne signifiante. Le sujet comme effet de signification est produit là comme réponse du réel à l’absence de l’Autre, à la castration de l’Autre ; nous allons voir en quoi il est plus particulièrement encore réponse à « la béance introduite par l’absence dessinée, et toujours ouverte » [18], absence de l’Autre, au pied de son lit, là où il porte son regard. La question se pose alors de comment engendrer un tel effet de sujet chez des enfants pour lesquels l’opération de coupure, de séparation, de négativisation de la jouissance n’a pas eu lieu. La thèse essentielle de Lacan est que l’enfant, bien avant d’être un sujet, est un objet ; il dit précisément que tout enfant est pour sa mère, une apparition dans le réel de l’objet de son existence. Le sujet n’est pas donné d’emblée. Lacan alla même jusqu’à lancer à ses auditeurs, lors d’un de ses séminaires : « vous êtes tous, en tant que rangés là – autant de fausses-couches de ce qui a été, pour ceux qui vous ont engendrés, cause du désir [19]. » C’est là que le sujet doit s’y retrouver, d’autant que l’objet a sous une forme vivante, toute fausse couche qu’il soit, manifeste qu’il est l’effet du langage. Il n’est pas de travail éclairé par la psychanalyse avec un enfant sans questionner pour chaque enfant l’état d’effectuation de la structure qu’il présente.

 

L’acte de parole détruit l’objet

Lacan a d’abord traité du jeu du Fort-Da en évacuant l’objet – la bobine – mais aussi l’objet regard, qui pourtant se révéleront être les pivots de l’affaire. Au début de son enseignement, Lacan ne situait l’objet que comme objet détruit ; l’action symbolisante du sujet, son acte de parole détruisait l’objet – le mot est le meurtre de la chose – voire que l’action du sujet devenait son propre objet. Dans cette première lecture de l’observation de Freud, la bobine ne comptait pour rien sinon comme détruite, car à ce moment-là, Lacan pensait que l’objet ne prenait corps que dans la différence symbolique – dans le couple signifiant fort-da. Le seul objet qu’il reconnaissait alors c’était le signifiant lui-même, c’est-à-dire le fort-da. Il affirmait de cette façon que le désir s’éternise dans la métonymie signifiante, et lui prêtait un destin de substitution. Dans « Fonction et champ de la parole et du langage », Lacan cependant nous montre que le masochisme primordial ne trouve pas encore là sa place [20]. Il interprétait à l’époque, l’automatisme de répétition du Fort-Da comme une mise en jeu du même à l’intérieur de cette répétition. Pourquoi cela n’ouvrait-il pas le sujet à une métonymie infinie, dans la substitution d’autres signifiants ? Pourquoi s’agit-il inlassablement de la répétition de ce même couple signifiant ? Plus tard, Lacan allait constater l’inertie propre au symbolique, au signifiant, et promouvoir le concept de jouissance à partir de l’engluement du sujet dans cette inertie [21]. Dans un premier temps, la répétition et l’inconscient restèrent confondus pour Lacan, puisqu’il disait que la répétition n’était rien d’autre que l’insistance de la chaîne. C’est cette première définition de la répétition qui en fit un phénomène situé dans le symbolique, causé par le symbolique, étant le symbolique lui-même à l’œuvre. Lacan présentait là l’automatisme de répétition comme se suffisant d’une mise en place signifiante, d’un couple de signifiants. Or, la répétition n’est pas seulement répétition signifiante, elle est aussi répétition de jouissance.

 

Le Fort-Da : la réponse du sujet au réel créé par l’absence de l’Autre

Lacan, dans son Séminaire Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, s’est interrogé sur la « remémorialisation de la biographie [22] » dont il remarque qu’elle se heurte pour le sujet à « une certaine limite qui s’appelle le réel [23] ». Une pensée adéquate, dit-il, en tant que pensée, évite toujours le réel. Cela lui a permis de définir le réel comme ce qui revient toujours à la même place ; ce sont les contours de la pensée qui cernent une place comme étant celle du réel – le réel que l’enfant répète dans ses jeux, en institution ou dans sa cure. Le jeu du Fort-Da illustre cette opération où se démontre, au niveau du jeu individuel, la solution de l’impossible apportée à l’enfant par l’exhaustion de toutes les formes d’impossibilités mises en équation par la paire signifiante fort-da. Envisager la répétition non plus comme un obstacle, mais comme une solution, donne une nouvelle orientation clinique. La répétition ne fait pas obstacle à la remémoration, elle apparaît comme la trace d’une rencontre manquée avec le réel [24]. Lacan ne met plus l’accent sur une jouissance liée à l’insistance de la chaîne signifiante mais sur la présentification d’une perte. La fonction de la répétition se définit dans le rapport de la pensée, du signifiant et du réel : « La répétition apparaît d’abord sous une forme qui n’est pas claire, qui ne va pas de soi, comme une reproduction, ou une présentification, en acte [25]. » Or un acte est différent d’un comportement, nous apprit Lacan, car il y a toujours en lui une part de structure qui est de « concerner un réel qui n’y est pas pris d’évidence [26] ».

Freud avait d’ailleurs précisé que le jeu du Fort-Da était pour lui l’équivalent d’un acte : « Tel était le jeu complet, on n’en voyait que le premier acte qui était inlassablement répété [27] ». En élevant ce jeu à la dignité d’un acte, Freud mettait en évidence le jeu comme réponse du réel. Cet acte, dira Lacan, inlassablement répété, inclut en lui la part de réel auquel il fait réponse. L’ensemble du jeu symbolise la répétition, « mais non pas du tout celle d’un besoin qui en appellerait au retour de la mère » [28] ; c’est la répétition même du départ de la mère, cause de la division du sujet, qui se trouve appareillée par le jeu du Fort-Da et qui permet de traduire l’absence de l’Autre, le manque de l’Autre. Le jeu de la bobine est la réponse du sujet à ce que l’absence de la mère est venue révéler c’est-à-dire la marque du réel. Lacan en a parlé de façon métaphorique en disant que cette absence a creusé à la frontière du domaine de l’enfant, au bord de son berceau, un fossé – c’est-à-dire un réel – autour duquel il n’a plus qu’à faire le jeu du saut.

C’est là une thèse fondamentale de Lacan : l’enfant, d’être un enfant, est fondamentalement traumatisé. Lacan crée le terme de troumatisme [29] pour systématiser le point de vue freudien sur l’enfant et illustrer la dysharmonie foncière, la discordance, le trou qu’il y a entre lui et ce qui l’entoure. L’enfant est suspendu à un monde capricieux, organisé selon un code dont il n’a pas la clé, qui s’impose à lui dans le fossé créé autour de son berceau ; ce fossé c’est le manque inexorable, le malentendu fondamental, la marque du rapport réel que le sujet entretient avec l’Autre ; c’est un vide, un moins que l’on peut aussi bien écrire le (- j) de la castration. La mère est le représentant – Repräsantanz – de cet Autre qui émerge de ce réel. Lacan, relisant Freud, a indiqué que ce Repräsantanz est là pour marquer que le signifiant de la mère comme Autre a à être enregistré comme tel au pôle opposé de la signification qui entrera en jeu dans la Vorstellung [30]. La mère émerge de ce fossé mais, en même temps, c’est elle qui révèle par son départ la « béance introduite par l’absence dessinée [31] ». Mieux vaut que son désir vienne dessiner le réel de cette absence car « Que deviendra la Vorstellung quand, à nouveau, ce Repräsantanz de la mère – dans son dessin marqué des touches, des gouaches du désir – viendra à manquer ? [32] ». C’est sur ce fossé, sur ce réel que le sujet aura à se déterminer, et qu’il n’aura plus qu’à faire le jeu du saut.

Si le sujet « comme effet de signification » est réponse du réel, nous saisissons ici que le jeu de la bobine est la réponse du sujet au réel créé par l’absence symbolique de la mère. Lacan a attiré notre attention sur cette bobine en indiquant qu’au moment où elle quitte le bord du lit, la bobine est une espèce d’objet a en relation avec le signifiant de la mère ; ce n’est pas la mère réduite à une petite boule, c’est une automutilation où se concentre ce qui se détache de l’enfant dans cette épreuve. La bobine illustre cette castration, ce (- j) contenant l’objet regard qui est en jeu.

 

L’incantation signifiante et la division du sujet 

C’est à partir de ce consentement à cette cession de l’objet, dont il avait la jouissance, que le sujet s’ouvre au langage et mettra en perspective l’ordre de la signifiance. Lacan dit que l’enfant fait un saut hors de son domaine et qu’il commence l’incantation signifiante fort-da. Plutôt que d’être entièrement pris dans le réel du départ de la mère, et de loger entièrement son corps dans le battement de l’opposition signifiante – comme on le voit chez certains sujets psychotiques qui passent leur temps à éteindre/allumer une lampe, ouvrir/fermer une porte – le sujet joue, c’est-à-dire jouit, d’abord avec des mots puis avec l’équivalent d’un morceau de son corps, la bobine. On pourrait dire qu’il se défend de l’absence de l’Autre, du désir de l’Autre par la mise en évidence d’un objet, la bobine, dont il va faire usage de jouissance, objet venant recouvrir le fossé, le réel, le (- j ) de la castration. Cet objet lui permet de traiter le manque de l’Autre, par la mise en jeu de l’objet regard et de voiler le vide de la castration qu’implique le départ de sa mère, départ qui a révélé la castration de l’Autre, en dévoilant son manque. Avec cet objet, l’enfant consent à l’absence de l’Autre par le truchement de la répétition qui tente de viser ce qui n’est pas là en tant que représenté [33]. Ce sujet se sépare d’une part de lui, ce qui n’est pas le cas du président Schreber, dont nous a parlé Freud, du Stanley de Bruno Bettelheim, du petit Robert de Rosine Lefort pour lesquels la prise directe du Fort-Da a lieu sur le corps ; dans ces trois cas, c’est le corps entier qui est soumis à l’alternative d’être laissé en plan ou d’être arrimé et jouissant ; la place, de n’être pas laissée vide, est remplie par la jouissance du corps – l’enfant, en place d’objet a, devient alors le bouchon, ou l’objet condensateur de la jouissance de l’Autre.

Lacan a dit, à propos du Fort-Da, que l’homme pense avec son objet et que c’est avec lui qu’il commence l’incantation signifiante. Cet objet auquel l’opposition s’applique en acte désigne le sujet. Pour Lacan, l’essence de la répétition de ce jeu est le processus même d’aliénation du sujet qui s’exprime au niveau du fort [34]. Le sujet ne dispose alors que d’un choix forcé, celui de la traduction et de la nomination.

S’il est difficile de saisir ce qui fait l’articulation radicale de ce jeu, on peut remarquer que l’enfant « s’y exerce à l’aide d’une bobine ». Bobine qui illustre la perte radicale du sujet du fait d’être pris dans le signifiant – c’est d’ailleurs pour cela qu’il s’agit d’une répétition sans fin traduisant le mécanisme même de l’aliénation signifiante. Le sujet est condamné « à n’apparaître que dans cette division [35] », dans cette vacillation radicale entre le côté où il apparaît comme sens, produit par le signifiant fort, et l’autre où il apparaît comme aphanisis. Le sujet se manifeste comme disparition – la bobine illustre magistralement cette part de lui qui disparaît d’être prise et véhiculée par le couple de signifiant fort-da. Ce qui se joue pour lui, c’est une affaire de vie ou de mort entre le signifiant unaire et le signifiant binaire, cause de sa disparition, c’est la répétition du départ de la mère comme cause de Spaltung dans le sujet. La répétition de ce jeu manifeste ici sa vacillation radicale.

La place du sujet ne se laisse pas saisir comme telle, Lacan en parlait plutôt comme d’une place vide. Le sujet est une variable, équivalant à un trou, une coupure dans le contexte signifiant qu’il met lui-même en perspective grâce aux représentations dont il va se servir.

 

Le Fort-Da matrice du fantasme

Le jeu du Fort-Da illustre comment un élément hétérogène au reste de la chaîne signifiante vient colmater et en même temps indiquer cette place vide. La bobine, Lacan l’a qualifiée d’un nom de son algèbre : le petit a [36]. Comme objet a, la bobine vient prendre sa fonction au point où le sujet manque à se représenter. Ce que nous enseigne, à cet égard, le Fort-Da, c’est que le sujet est, bien sûr, foncièrement ce qui est représenté par un signifiant pour un autre signifiant, mais qu’il est aussi ce dont la place se trouve occupée par l’objet a, quand il ne peut pas être représenté par le signifiant. L’objet a ne représente pas le sujet, il ne renvoie pas à un autre objet, c’est une pure présence. C’est à partir de cela que Lacan a rendu compte du fantasme et, à cet égard, nous pouvons sans doute voir dans le Fort-Da ce qui serait la matrice du fantasme. Le Fort-Da illustre ce moment où le sujet rencontre un manque dans le signifiant, un manque à se représenter qui le confronte à un manque-à-être ; il en appelle alors à un élément du registre imaginaire. Lorsque l’enfant rencontre le manque de l’Autre, lorsqu’il se trouve pris ou happé par le désir de l’Autre, il se trouve confronté à un manque, à un ratage que Lacan qualifia de réel – comme étant ce manque qui, de structure, revient toujours à la même place entre le sujet et l’Autre. À ce moment-là, il y a nécessité pour le sujet de s’en remettre à un élément étranger au registre proprement signifiant. Le sujet fait appel à un objet de l’ordre imaginaire mais, derrière cet appel à l’imaginaire, c’est un élément réel qui vient, qui insiste à la place, « qui fait le vrai soutien, la consistance de l’image spéculaire de l’appareil du moi [37]. »

Nous pouvons là esquisser une clinique de la création et de l’objet. Le petit-fils de Freud crée un jeu sur fond de manque-à-être. Le vide laissé auprès de lui par le départ de sa mère ne renvoie qu’à son propre vide de structure. Ce vide va s’incarner comme castration à propos de laquelle Lacan parle d’« incarnation du sujet ». L’objet bobine est créé à partir de ce vide pour le contenir, pour donner un lieu à ce (- j) qui est l’équivalent incarné du sujet et qui est créateur de l’objet dont il s’enveloppe. Cet objet, qui n’est pas interprétable en tant qu’objet, n’en est pas moins situé par rapport à des coordonnées de discours, et on peut le localiser à partir du signifiant maître S1 et du sujet.

 

L’envers du Fort-Da comme moyen de jouissance

Freud, en 1920, a découvert que l’essentiel de ce à quoi nous avons affaire dans l’exploration de l’inconscient, c’est la répétition. Lacan le fit remarquer dans son Séminaire Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, en critiquant la différenciation initialement faite par Freud entre inconscient et répétition. L’essentiel de l’inconscient n’est pas l’effet de vérité mais l’effet de jouissance qui vise la jouissance perdue, du fait du manque de l’Autre, mais aussi du fait de l’inscription du sujet dans le langage. La répétition est « fondée sur un retour de la jouissance [38]. » La mère s’en va, l’enfant abandonné maîtrise son déplaisir en reproduisant son départ et son retour avec ce petit objet et en scandant des phonèmes. Dans Au-delà du principe de plaisir, Freud s’était interrogé sur cet attrait manifesté par le sujet pour la répétition du temps de déplaisir. C’est justement cette satisfaction mystérieuse trouvée dans le déplaisir-même que Lacan, grâce à Freud, a appelé jouissance. Se faire un peu mal, souvent d’ailleurs par l’intermédiaire d’un Autre tout à fait sur mesure, comme l’œuvre de Sacher Masoch le met en scène, c’est quelque chose que l’on observe chez certains enfants qui tiennent justement à cet Autre qui leur fait un peu mal. Ce qui fait sortir l’enfant du douillet de son corps, où il s’endort, pour lui faire sentir un peu ce corps ; « ça commence à la chatouille et ça finit par les flambées à l’essence [39] ».

Lacan pointa dans la répétition du signifiant fort une marque équivalente à celle que le sujet peut chercher à recevoir ou à s’infliger lui-même sur le corps. La répétition, c’est l’identification de la jouissance. « Il faut une marque sur le corps qui peut aller jusqu’à la destruction pour en extraire une homéostase, un déplaisir exquis [40]. » C’est en ce point précis que Jacques Lacan revint sur le S1 ; le signifiant fort provoque et commémore à la fois une irruption de jouissance ; par ce représentant, le sujet garde la mémoire de la perte et le comblement du retour. Ce S1, fort, est l’équivalent du trait unaire que Lacan a qualifié de mémorial de jouissance [41] ; il ne reproduit pas la jouissance elle-même, il est le mémorial de cette jouissance perdue qui ne se retrouve pas. Le trait unaire introduit donc la dimension de la jouissance sous la double forme de la nostalgie liée à la perte et de la quête de la récupération. C’est par le signifiant et la marque que s’extrait la jouissance. Le signifiant est à la fois producteur de jouissance et effaceur de la jouissance originelle dont on ne sait rien. Cette déperdition de jouissance est un effet mécanique de la prise du corps dans le langage, à partir de quoi chaque sujet s’évertue, comme le fit le petit-fils de Freud, avec une marque (fort) à en faire surgir encore quelque chose. C’est là qu’intervient la bobine ; c’est dans cette tentative de récupérer un petit quelque chose que le sujet va plutôt produire une perte. En recherchant un plus-de-jouir, le sujet se confronte à la rencontre et à la production d’une perte.

 

Le sujet du signifiant ainsi produit ne se conçoit pas sans son articulation à la jouissance. L’institution du sujet comporte et emporte avec lui la jouissance. Lacan a reformulé l’articulation du sujet à la chaîne signifiante fort-da d’une part et, d’autre part, à l’objet a. Il joua du Fort-Da à l’intérieur même de son enseignement pour éclairer le rapport du sujet à la chaîne signifiante et à ce qui lui résiste, à ce qui revient toujours à la même place, et qui est le rapport du sujet à sa jouissance et à cet objet a qui devient le partenaire de cette jouissance.

Le jeu du Fort-Da comme articulation signifiante illustre aussi ce qu’il en est du savoir : « Il s’agit très précisément de quelque chose qui lie, dans une relation de raison, un signifiant S1 à un autre signifiant S2 [42]. » Le savoir relève du trait unaire, du trait unaire fort qui est la forme de marque la plus simple, et qui est à proprement parler, selon Lacan, l’origine du signifiant : « C’est du trait unaire que prend son origine tout ce qui nous intéresse, nous, analystes, comme savoir [43] ». Lacan a aussi rappelé à cette occasion que la « première de nos règles est de ne point interroger sur l’origine du langage, ne serait-ce que parce qu’elle se démontre suffisamment de ses effets [44]. » L’effet du langage est rétroactif car il manifeste ce qu’il en est du manque-à-être. Si, pour structurer correctement un savoir, il faut renoncer à la question des origines, Lacan a certifié que le savoir relève du trait unaire. Il a alors parlé du savoir, comme moyen de jouissance, moyen, qu’il faut entendre ici comme instrument permettant d’obtenir de la jouissance, mais aussi comme modalité de jouissance.

 

Le Fort-Da, figure de rhétorique

À propos du Fort-Da, Lacan a parlé de l’incantation signifiante [45], voire de figure de rhétorique. La rhétorique, c’est l’art du langage qui l’emporte sur le réel, en tentant de l’éliminer, en venant à sa place pour emporter la conviction de l’auditoire. C’est ainsi que Lacan a d’abord prêté au jeu du Fort-Da une fonction de maîtrise du départ de la mère. La rhétorique n’est pas une science, c’est l’art de se faire entendre, de faire résonner l’opinion comme la doxa par le bien-dire. C’est en ces termes que Lacan a présenté, dans sa « Conférence aux Américains », le Fort-Da : « C’est tout le système qui se présente comme s’il était inné que l’enfant joue, à propos d’un départ de sa mère, avec l’énoncé qui a tellement frappé Freud – cela chez un de ses petits-enfants –, l’énoncé Fort-Da. C’est là que tout s’insère. C’est déjà, ce Fort-Da, une figure de rhétorique [46] ». Il s’agit d’une véritable création signifiante. Face au réel en jeu, le sujet invente le signifiant par le jeu normal de la présence et de l’absence, véritable base logique du signifiant dans son essence, donner un semblant de présence au réel de l’absence, celui que l’objet, ici la mère, ne fait de toute façon que masquer et marquer. L’important n’est pas la réalité du départ de la mère, comme Lacan l’a précisé, ce n’est pas la porte par où elle s’en est allée que l’enfant regarde, c’est le point d’où il la voit partir, là où elle l’a laissé, véritable fenêtre que son absence révèle et qui reste, dès lors, la cause d’un tracé centrifuge [47].

La cause freudienne est une cause ouverte, liée à la mise en évidence logique du réel en jeu que Lacan n’aura de cesse de logifier. Elle n’est pas fermée par la présence ou l’absence de la mère, ni par le sens introduit par ses allées venues. La cause ouverte est une cause hors sens et par là même ouverte à tous les sens dont on peut jouir, d’où la jouis-sens. L’objet bobine et la mère ne sont pas le réel, ils n’en sont que le semblant, le tenant lieu. Le réel auquel l’enfant est confronté, c’est l’exclu du sens, le vide d’où s’origine pour lui la création rhétorique. Lacan a choisi de ne plus interroger le sens – ici l’ab-sens incarné par la porte que franchit la mère – pour faire confiance à ce qui se passe du côté du sujet, du côté de la fenêtre qu’il ouvre lui-même sur le monde, à la création signifiante qu’il va produire, à ce qu’elle comporte de fiction voire de fixion face à cette jouissance hors sens. Lacan n’a pas abordé le monde par le biais de la réalité, mais à partir du réel. Ce qui l’intéressait, était du côté de l’invention du signifiant dans la destinée de l’être parlant : « Cela a affaire avec la structure, laquelle, s’appareille. L’être humain, qu’on appelle ainsi sans doute parce qu’il n’est que l’humus du langage, n’a qu’à s’apparoler à cet appareil-là [48]. » La réalité – de l’absence de l’Autre – est abordée avec les appareils de la jouissance.[49] D’appareils, de moyens de jouissance, il n’y en a pas d’autres que le langage. C’est ainsi, chez l’être parlant, que la jouissance est appareillée.

Si le langage se pose comme appareil, le jeu du Fort-Da nous enseigne que, chez l’enfant, très tôt, la jouissance s’appareille grâce à la parole, grâce au signifiant mais aussi grâce à l’objet.

 


Philippe Lacadée

 

 

 

[1] Freud S., Essais de psychanalyse, Nouvelle traduction, Petite bibliothèque Payot, 1981, p. 52.

[2] Miller J.-A., « L’orientation lacanienne. Du symptôme au fantasme et retour », enseignement prononcé dans le cadre du département de psychanalyse de l’Université Paris VIII, cours du 17 novembre 1982, inédit.

[3] Ibid.

[4] Ibid.

[5] Ibid.

[6] Ibid.

[7] Ibid.

[8] Lacan J., « La direction de la cure et les principes de son pouvoir », Écrits, Seuil, 1966, p. 637.

[9] Ibid.

[10] Dessin d’Alice et Philippe Lacadée

[11] Freud S., « Au-delà du principe de plaisir », Essais de psychanalyse, Petite bibliothèque Payot, p. 52.

[12] Lacan J., « Propos sur la causalité psychique », op. cit., p. 187.

[13] Ibid., p. 187.

[14] Lacan J., « Remarque sur le rapport de Daniel Lagache », Écrits, op. cit., p. 666.

[15] Freud S., « Au-delà du principe de plaisir », op. cit., p. 55.

[16] Lacan J., « Fonction et champ de la parole et du langage », Écrits, op. cit., pp. 318-319.

[17] Lacan J., Le Séminaire, livre IV, La Relation d’objet, op. cit., p. 330.

[18] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, op. cit., p. 60.  

[19] Lacan J., Le Séminaire, livre XVII, L’Envers de la psychanalyse, op. cit., p.207.

[20] Lacan J., « Fonction et champ de la parole », op. cit., p. 318.

[21] Miller J.-A., « Présentation de L’Envers ou la psychanalyse mise à nu par son célibataire », après-midi du Secrétariat de ville de l’ECF et de la Section clinique, Bordeaux 1991, Cahier de la Section clinique Bordeaux, le 20 juin 1992.

[22] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, op. cit., p. 49. 

[23] Ibid.

[24] Ibid., p. 39.

[25] Ibid., p. 50.

[26] Ibid., p. 50.

[27] Freud S., « Au-delà du principe de plaisir », op. cit., p. 53.

[28] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, op. cit., p. 61.

[29] Inédit : Lacan J., Le Séminaire, livre XXI, « Les non dupes errent », leçon de 19 février 1974, inédit.

[30] Repräsantant est en allemand un mot qui a le statut de "Fremdwort", de mot étranger inclus dans la langue (ici, un mot français).  Il désigne le représentant au sens de tenant-lieu (Verstreter en allemand). Freud emploie tantôt ce terme masculin, tantôt le féminin Repräsentanz qu'on pourrait rendre par "représentance".

Vorstellung désigne la représentation dans son sens d'image, image par laquelle la chose vient se présenter, image dans sa valeur intensive et non pas duplicative. Ici le jeu de la bobine et son Fort-Da est le tenant lieu de la représentation de l'absence de la mère.

[31] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, op. cit., p. 60.

[32] Ibid., p. 61.

[33] Ibid.

[34] Ibid., p. 50.

[35] Ibid., p. 191.

[36] Ibid., p. 60.

[37] Lacan J., Le Séminaire, livre XVII, L’Envers de la psychanalyse, op. cit., p. 55.

[38] Ibid., p. 51.

[39] Miller J.- A., « Présentation de L’Envers… », op. cit.

[40] Ibid.

[41] Ibid.

[42] Lacan J., Le Séminaire, livre XVII, L’Envers de la psychanalyse, op. cit., p. 32.

[43] Ibid., p. 52.

[44] Ibid., p. 181.

[45] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, op. cit., p. 60.

[46] Lacan J., « Conférence aux Américains », Columbia University, le 01.12.75, Silicet 6/7, Seuil, 1976, p. 47.

[47] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, op. cit., p. 60.

[48] Lacan J., Le Séminaire, livre XVII, L’Envers de la psychanalyse, op. cit., p. 57.

[49] Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, Seuil, 1999, p. 52.




bottom of page