Dominique Grimbert – Merci de nous accorder cette interview, François Berléand, pourrait-on dire que la psychanalyse vous est un peu familière ?
François Berléand – Un petit peu beaucoup... Disons que l'analyse, non, parce que j'en ai fait une qui n’a duré qu’un peu plus d’un an. Mais, mon adolescence s’est faite avec beaucoup de psys, des psychothérapeutes, des psychologues, j’ai aussi vu des psychiatres et puis, à la fin, à quarante ans, j'ai commencé une analyse. Et, comme il se trouve que j’ai fréquenté beaucoup de psys, ça a été extrêmement rapide. C’est moi qui ai décidé, vraiment assez vite, de dire : « Bon, je ne vais pas tourner en rond toute ma vie là-dessus. J’ai compris. » J’ai trouvé assez vite, je suis entré dans le vif du sujet très rapidement, d’ailleurs, j’ai même écrit un livre.
DG – Oui, Le Fils de l’Homme Invisible.
FB – C’est à la suite de mon analyse que je l’ai écrit. Ce qui est assez drôle, c’est que j’avais des images tellement précises de tout ce que j’avais vécu de six ans à dix-sept ans, que tout s’est fait naturellement, j’ai fait ça très vite. Ces images revenaient avec une netteté incroyable, je les avais eues en analyse, et au fur et à mesure je me suis dit que c’était ça. C’est la parole, la parole du père.
DG – Votre expérience illustre comme on peut être marqué par une phrase, un mot, qu’on entend, dans votre cas cette phrase de votre père : « Tu es le fils de l’homme invisible ».
FB – Oui, c’est ça : « De toute façon, tu es le fils de l’homme invisible. » Ça ne parlait que de lui en fin de compte ! C’est dans l’analyse que je m’en suis rendu compte. C’est-à-dire que mon père était juif russe, ma mère était catholique et ses parents étaient antisémites donc, lui, s’est converti au catholicisme pour se marier avec ma mère. Et, en fin de compte, mes grands-parents ne lui parlaient jamais, ils parlaient toujours à ma mère. Ils lui demandaient : « comment ça s’est passé ta, votre, semaine ? », il y avait le tutoiement et le vouvoiement. Et le vouvoiement, c’était pour mon père, mais il n’était jamais regardé. En fin de compte, il était invisible pour mes grands-parents maternels. Et du côté paternel, pour Mapapoushka, sa belle-fille lui avait volé son fils, c’était horrible. J’ai vécu avec des parents qui étaient détestés par leurs beaux-parents. C’est souvent le cas.
Philippe Lacadée – Oui. Quand vous relatez la phrase de votre père, vous avez une précision qui est importante, vous dites : « Je l’ai cru ».
FB – Oui.
PL – C’est-à-dire vous avez eu une croyance en la parole de ce père.
FB – Oui, mon père était vieux…
PL – Si vous n’aviez pas cru cette parole, est-ce qu’elle aurait eu autant de points d’impact ?
FB – Non, bien sûr, c’est le principe. J'’avais quarante ans d’écart avec mon père. J’avais dix ans quand lui m’a dit ça, donc il avait cinquante ans à cette époque-là. Ça faisait des messieurs d’un certain âge. Mon père ne parlait jamais à mon frère et moi. Il parlait avec sa femme, il parlait avec ses amis, beaucoup, mais, à nous, il ne parlait jamais. Il y avait une espèce de pudeur. Les enfants ne parlaient pas à table, j’étais de cette génération-là, la dernière qui n’avait pas le droit de parler à table, qui devait se lever quand une femme arrivait, tant mieux d’ailleurs. Cette espèce de galanterie, d’éducation, je ne vais pas dire bourgeoise parce que mon père ne l’était pas, mais c’était une éducation à l’aancienne, donc on ne parlait pas à table et on se taisait. Quand il y avait des dîners, comme ce dîner-là, quand mon père m’a dit cette phrase insensée, il y avait plein d’amis de mes parents, et je ne pouvais même pas dire quoi que ce soit puisque, de toute façon, les enfants ne parlent pas à table. C’est pour ça que ça été très particulier, je n’en parle pas dans le livre parce que, sinon, évidemment, ça aurait mis sur des fausses pistes. J’ai demandé à maman si je pouvais me lever, je me suis levé, j’ai regardé dans la glace et je ne comprenais pas qu’on puisse me voir. C’est là où je me suis inventé une vie rêvée, une vie différente avec des glaces qui ne reflétaient absolument pas mon apparence. Après, ça s’est transformé en trisomie, enfin en plein de choses différentes. Heureusement, j’ai été sauvé par un psychologue de lycée. Moi, ce qui me plaît chez les psys, c’est l'écoute.
Il se trouve, et c’est assez drôle par rapport à mon métier, que je suis allé sur la trace de mes ancêtres. J’ai fait une émission qui s’appelle Retour aux sources, je voulais absolument en savoir plus sur mon grand-père paternel qui était mort à Auschwitz. Donc je suis allée à Odessa parce qu’il était juif ukrainien, pas russe, mais ukrainien. À Odessa, j’ai rencontré un comédien yiddish. C’est assez étrange parce que je ne parle pas du tout russe, ma grand-mère Mapapoushka nous parlait en russe mais on ne comprenait rien, et quand je me suis adressé à lui pour savoir s’il y avait une différence de jeu entre un comédien russe et un comédien qui joueraient en yiddish la même scène, à ce moment-là, lui m’a parlé en russe, et j’ai compris tout ce qu’il m'a dit. Je n’ai pas eu besoin de la traductrice, j’avais compris. Et j’ai compris mon jeu, c’est-à-dire que les comédiens qui jouent en yiddish prennent de grands temps et parlent beaucoup avec les mains. Il se trouve que je parle beaucoup avec les mains et, surtout, je prends de grands temps de réflexion alors qu’évidemment, je connais mon texte par cœur. Après, j’ai appris qu’Harold Pinter était juif et lui aussi met des temps. Dans ces œuvres théâtrales, il y a temps, pause, un peu plus vite, un peu plus lent, et c’est très étrange parce que j'ai compris –j’avais déjà joué une pièce de Pinter, même deux – ce que ça voulait dire intuitivement. Avant que je ne fasse cette émission, j’avais pris des grands temps, des temps en moins et ça me plaisait beaucoup. Je me suis rendu compte en parlant avec beaucoup de comédiens d’origine juive qu’il y avait aussi ça en eux, alors qu’ils ne connaissaient pas du tout leurs racines, et la façon dont les comédiens yiddish pouvaient jouer. J’ai compris que le silence, c’était très important. C’est drôle, je me suis dit : « Tiens, mais alors Freud qui était juif, lui aussi, devait avoir, même s’il n’était pas comédien évidemment, ce silence qui fait… qu’on écoute. » Dans le silence, on écoute ; le silence, ça fait écouter le public. S’il y a quelqu’un qui parle, un grand monologue, et que l’autre enchaîne tout de suite, le monologue passe un petit peu à l’as. Moi je fais toujours en sorte d’attendre deux ou trois secondes, que les gens aient pu digérer ce qui a été dit avant.
DG – Oui, c’est comme une ponctuation qui met en valeur la parole.
FB – Oui, voilà. Quand j’ai discuté avec Audrey Schebat, l’autrice de la pièce, qui est juive séfarade, alors qu’elle me demandait d’enchaîner, je lui ai répondu que non, je ne pouvais pas enchaîner, il fallait que j’attende, que les gens comprennent ce qui se dit. Et donc, j’ai réussi, pas autant que j’aurais voulu, à mettre quelques petites pauses à certains moments de la pièce. Ce qui est amusant, c’est peut-être l’âge qui fait ça, le physique, la barbe, tout ça… on me donne beaucoup de psys à jouer.
DG – C’est ce que vous me disiez quand on s’est rencontrés.
FB – Oui. L’avant-dernière pièce que j’ai jouée, c’était Par le bout du nez. J’y jouais un psychanalyste qui était dépêché en urgence à l’Élysée pour le premier jour du quinquennat d’un Président de la République. Dès qu’il commençait à répéter son discours à la télévision, il était bourré de tics. Donc, le psychanalyste que je jouais faisait une analyse en une heure et demie. C’était drôle, les gens étaient ravis parce qu’il y avait des petites choses de la psychanalyse, que tout le monde connaît, en tout cas les gens qui vont au théâtre. Ça donnait un humour très particulier. Quand je joue La Note, le psychanalyste que je suis censé être n’apparaît pas beaucoup, je trouve. On aurait pu en faire un psychanalyste plus intéressant, ne serait-ce que savoir pourquoi il se suicide ; ce qui n’est jamais dit dans la pièce. C’est quelqu’un qui veut faire de l’humour, un peu cynique mais il ne dit pas grand-chose sur le métier de la psychanalyse.
DG – Si ce n’est peut-être sur le fait d’attendre le cadeau Bonux, la surprise ?
FB – Oui, c’est ça ! Le cadeau Bonux ! Alors Audrey, l’autrice, est en analyse depuis vingt ans. Il se trouve que j’ai vécu avec des femmes qui ont été en analyse très longtemps. L'une, d’ailleurs, l’est toujours et, quand je l’ai connue, ça faisait déjà vingt ans qu’elle y était. Maintenant, elle doit être à cinquante ans d’analyse. Je lui dis : « ça fait un peu beaucoup, je trouve, peut-être devrais-tu arrêter. »
DG – Et le prochain rôle, vous me disiez que ce serait le rôle de Freud ?
FB – Oui, Freud. Là, carrément, ce sera le grand maître ! C’est une pièce dont je ne peux pas parler pour l’instant, mais je vais vous la pitcher, comme on dit dans le métier, sans dire la fin bien entendu. C’est Freud qui est dans un hôtel à Rome et, dès le début, il téléphone à la réception pour dire qu’il ne doit pas être réveillé avant midi. Quand arrive le lendemain matin, la femme de chambre lui ouvre les volets à neuf heures trente et donc, il entre dans une colère importante, puis il se calme. C’est comme une analyse inversée qui va se faire au fur et à mesure. C’est le sens commun qui va analyser le maître. La femme de chambre, sachant que c’est Freud, mais ne sachant pas vraiment qui il est, pense que c’est un hypnotiseur de cirque au départ. Elle va analyser des choses de l’inconscient de Freud, c’est très drôle, au fur et à mesure que Freud va lui dire des choses, ce qu’il a rêvé, par exemple et c’est l’interprétation des rêves, selon le savoir de sa grand-mère, l’astrologie… Ça ne le met pas en colère, plutôt dans une situation inconfortable. Il doute et se dit : « Mais tout ce que j’ai découvert est-ce vain ? » Le texte est très intéressant. Là, pour moi, c’est la pièce la plus intéressante que j’ai faite sur la psychanalyse. J’ai fait des films où j’étais analyste, aussi.
PL – Ce qu’il y a d’intéressant dans la pièce La Note, et d’ailleurs vous le dites très bien, c’est ce que vous incarnez de la position de l’analyste. Le personnage a l’air de dire avoir atteint un certain non-sens de la vie, c’est-à-dire qui échappe un peu au sens commun. Les patients viendraient chercher quelque chose de l’ordre du sens, au fond, pour arriver à un point de non-sens. C’est là d’ailleurs que, dans la pièce, vous faites référence à Freud, mais aussi à Lacan, c’est une pièce très lacanienne, qui conduit à un point de réel.
Seriez-vous d’accord pour dire que c’est ça que l’analyste trouve, tout à coup, dans un éclair de lucidité, on ne sait pas trop pourquoi et, du coup, le non-sens de sa vie apparaît ? Le dialogue que vous avez après, avec Sophie Marceau, bascule et, ne le prenez pas mal, vous rend ridicule, vous l’analyste, parce qu'au fond vous êtes toujours à la recherche du sens, alors qu’elle, avec sa note, qui se chiffre comme une note mathématique, ou une note de musique, vous dit : « Mais regarde ! De toute façon la vie, ça n’a pas de sens. Qu’est-ce que tu vas chercher ? » C’est une leçon d’ironie plus que d’humour, à mon avis, sur ce que peut être la psychanalyse.
FB – Oui. Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dites. Quand elle parle, dans le deuxième acte, une fois que j'ai parlé du cadeau bonux, elle commence à me parler de ce qu’est la vie, le non-sens de la vie, toutes les questions qu’on peut avoir quand on a treize ou quatorze ans, des questions existentielles, qui devraient plus ou moins être résolues avec la lecture de Camus, de Sartre et d’autres, résolues en cours de français, même pas en philo, en première ; peut-être pas résolues, parce qu’on ne résoudra jamais l’existentialisme, mais, en tout cas, ce sont des questions que je trouvais un peu bébêtes, des questions auxquelles je n’avais pas de réponse, c’est-à-dire qu’elle parle et moi je ne réponds pas à ce moment-là. J’ai dit à Audrey : « Mais quand on est en situation de monologue, comme c’est le cas avec Sophie Marceau, pourquoi moi je ne parle pas ? La prochaine fois que tu écris une pièce avec des monologues, il faut que tu penses à celui qui reçoit le monologue, et comment il le reçoit en étant psy », c’est-à-dire quand même quelqu’un d’assez haut de gamme au niveau de l’intelligence, au niveau culturel, enfin c’est ce que vous représentez, et vous avez aussi quelques réponses. On ne s’est même pas demandé si j’étais freudien, jungien ou lacanien. Donc, j’ai dit : « Écoute, moi, je vais dire que je suis freudien, puisque je vais jouer Freud après. C’est plus simple, il parle quand même. Mais est-ce que je dois me mettre en position lacanienne, c’est-à-dire écouter ce que l’autre dit sans rien dire ou est-ce que je dois avoir une réponse ? Et pourquoi je n’ai pas de réponse ? » En fin de compte, elle n’y avait pas réfléchi, ce qui est dommage pour elle. Mais, moi, François Berléand acteur, je n’ai pas de réponse, je ne sais pas pourquoi je ne réponds pas à Sophie Marceau, enfin au personnage de Maude. Et ça me pose un vrai problème parce qu’en fin de compte, on ne saura jamais le pourquoi du comment je me suicide. Nous avons eu cinq ou six heures de discussion avec Audrey, et j’ai des petites réserves sur le texte, mais malgré tout, j’aime cette pièce parce qu’il y a du jeu, et vous avez raison de dire que c’est de l'ironie sur la psychanalyse.
PL – Oui, c’est de l'ironie. Moi, je suis allé voir cette pièce alors que je ne savais pas du tout de quoi ça parlait. Donc, j’ai été absolument surpris, même joyeux. Je me suis dit que c’était une leçon sur ce qu’est la psychanalyse. Vous savez, la série En thérapie qui a fait florès, je me disais que c’était un peu la même chose, c’est-à-dire que ça rend enthousiaste paradoxalement vis-à-vis de la psychanalyse, dans le sens où on se dit, ce psychanalyste, il n’a pas fait qu’écouter, il a entendu. Ça, c’est la différence que fait très bien Lacan entre écouter et entendre. Il a entendu dans ce qu’il écoutait, qu’au fond, il y avait un certain non-sens structural à la vie. C’est ce que dit Maude : « Écoute, la vie, c’est la vie. Donc fais ce qu’il y a à faire. » Vous comprenez ce que je veux dire ?
DG – Oui, parce qu’il est quand même au rendez-vous à la fin. Finalement il y va, il n’a pas de réponse traduite en mots mais il pose l’acte de changer sa vie et de changer leur vie. Dans ce que vous disiez tout à l’heure du psychanalyste d’orientation lacanienne, il n’est pas toujours silencieux…
PL – Oui, il ne faut pas croire ça.
DG – Il ponctue, entend les équivoques, je ne pense pas qu’il ait de réponses, en revanche. Logiquement, il va vers un savoir-y-faire avec ce qui est de l’ordre du hors-sens, ou de l’absurde, si l’on reprend Camus. Et, à la fin de la pièce, c’est peut-être sa réponse au personnage : « Bah chérie, partons. »
FB – Oui, voilà, c’est ça : « T’as raison, partons ! » Mais c’est sûr que le propos d’Audrey Schebat est très camusien. On est sur l’absurde, le non-sens, Nietzsche, il parle du tonneau des Danaïdes, le mythe de Sisyphe... Quand j’avais lu la pièce, j’avais vraiment pensé à Camus, dans la seconde, parce qu’il y a l’absurdité de la vie, pourquoi on naît, l’infini… Pourquoi ?
PL – Ce qu’il y a d’intéressant par rapport à l’homme invisible, c’est que vous incarnez quelque chose du psy qui n’est pas une fonction invisible. Il dit ce qu’il éprouve, ce qu’il ressent, c’est-à-dire que c’est un corps vivant, et ça le rend extrêmement sympathique. On a envie d’aller lui parler et on se dit : « Ouh là ! qu’est-ce qu’il a dû traverser ?! » Et au fond, c’est un peu ce que vous révélez au début de l’entretien.
FB – C’est un psy dans son intimité, pas dans son travail. Si vous avez l’occasion, regardez Par le bout du nez. France Télévisions la rediffuse. C’est de la pure comédie, mais c’est assez intéressant sur la psychanalyse. La pièce dans laquelle je vais jouer Freud, telle qu’elle est écrite, c’est un petit bijou. Ça s’appellera Freud et la femme de chambre et vraiment c’est très intéressant.
PL – Ça va tourner en province ?
FB – C’est toujours le problème, on ne sait pas avant. Si la pièce est appréciée par les programmateurs, oui. Vous, vous êtes à Bordeaux, c’est ça ?
PL – Oui. Si vous venez, on pourra organiser une soirée avec vous et la réalisatrice, ce serait intéressant. Parce qu’après la représentation de la pièce La Note, c’est pour ça qu’on vous a attendu, nous sommes allés au restaurant en face, ils vous connaissent très bien et vous adorent, et nous avions envie de débattre. C’est une pièce qui pousse à vouloir monter sur scène.
FB – Eh bien d’accord ! Si on joue à Bordeaux, ce sera au Pin Galant. Et il y a une tournée pour La Note, parce que c’est un événement, Sophie Marceau au théâtre.
DG – C’est son retour douze ans après.
FB – Oui, c’est un retour, ça fait très longtemps qu’elle n’avait pas joué.
DG – Et puis le texte est très bien écrit.
FB – Oui, c’est vrai, le texte est magnifique.
PL – Quand on vous a proposé ce rôle, on connaissait votre parcours psy, l’homme invisible, votre rapport à la psychanalyse ?
FB – L’autrice, oui, elle savait mon parcours. Elle avait lu mon livre.
PL – Elle vous a donc choisi.
FB – Oui, elle m’a vraiment choisi parce que j’avais joué une autre pièce avant, avec Niels Arestrup, qui s’appelait 88 fois l’infini. On a joué aussi à Bordeaux d’ailleurs. Cette pièce, c’était deux demi-frères qui ne s’étaient pas vus depuis dix ans, ils avaient eu la même femme. Ma femme était partie avec lui. On avait le même père. Mon ex-femme m’avait demandé de venir voir ce qui se passait avec lui. Et il était question de tout un travail d’analyse, il y avait plus de travail d’analyse dans cette pièce où je jouais un relieur de livres que dans La Note. Là, je faisais un véritable travail d’analyse et les gens me disaient à la fin : « c’est drôle parce qu’on dirait que vous êtes un psy. » Ben oui, c’est ça, c’est ma vie, maintenant, je suis un psychanalyste.
Avant ça, avant Par le bout du nez, je jouais une pièce dans laquelle j’étais le mari de Michèle Laroque, un metteur en scène de théâtre qui était mort. Personne ne me voyait, sauf elle et le public bien sûr. Et j’étais comme une espèce d’inconscient, qui lui disait de faire ci, de faire ça... C’était un personnage qui était à la fois de comédie parce que ça faisait rire le spectateur évidemment, et je lui disais aussi des choses importantes sur le travail, sur le fait de faire cette pièce ou pas. Donc, à chaque fois, ce sont des personnages qui sont en rapport avec la psychanalyse. Nous, les acteurs, on a besoin de s’intéresser à la psychologie du personnage, quand on répète une pièce de théâtre ou quand on joue un film. On a besoin d’avoir tous les ressorts possibles et imaginables pour se construire un personnage. C’est pour ça qu’on est tous passionnés par la psychanalyse.
PL – Tous les acteurs ?
FB – En tout cas, ceux qui pensent un peu...
PL – C’est intéressant parce que vous avez l’air de dire que les acteurs seraient plus passionnés par la psychanalyse que certains psychiatres ou psychologues qui s’orientent vers le comportementalisme ou la psychologie du cerveau. Un jour, une patiente m’a dit : « Oh, je ne vais pas vous dire ça parce que ça va pas plaire à mon cerveau » comme si, à la place de l’inconscient, ils avaient mis le cerveau. C’est pour ça que c’est intéressant le théâtre, dans la mise en scène, se met en scène, comme disait Freud, l’autre scène. Il parlait de l’inconscient comme de l’autre scène, d’où l'importance que les acteurs y soient sensibles.
DG – C’est une position assez féminine la position d’acteur. Vous vous laissez imprégner par un personnage, vous le recevez pour ensuite le faire passer. On fait souvent le parallèle, par exemple Delphine Horvilleur, entre une femme, un Juif et un psychanalyste qui auraient quelque chose en commun.
FB – On fait un métier où l’on est pris dans le regard. C’est féminin comme métier, mais c’est vrai que j’ai très longtemps vécu avec Nicole Garcia, c’est elle qui a cinquante ans d’analyse…
PL – Vous avez vécu avec Nicole Garcia ? Vous êtes un homme chanceux alors ?
FB – En tout cas, je l’ai aimée au-delà de tout, mais c’était un peu fatigant. On s’était connus sur une pièce de théâtre, quand je la voyais sur un plateau comme comédienne, elle était dans le regard. Comme j’avais fait la mise en scène, je sentais qu’elle avait toujours besoin du regard du metteur en scène, d’un regard bienveillant. Et après, on a fait des films ensemble dans lesquels elle était comédienne et elle avait quelque chose dans la séduction, non seulement du metteur en scène, mais de l’équipe et de la caméra. Après, quand elle était réalisatrice, il y avait un côté masculin, qu’elle peut avoir d’ailleurs dans la vie, c’était elle qui dirigeait. Comme je faisais des films avec elle, j’étais interprète de temps en temps, donc j’avais cette espèce de côté féminin puisque j’attendais ce qu’elle allait pouvoir me dire. C’est vrai que le métier de comédien ou comédienne, c’est vraiment un métier très féminin.
DG – J'ai lu qu’enfant, en allant à l’école, il y a cette scène où vous vous déshabillez parce que vous vous pensez que vous êtes invisible. Avec les difficultés que vous avez traversées, avez-vous subi du harcèlement ou la relation avec les autres enfants a-t-elle été simple ?
FB – J’ai changé d’école très souvent. Mais, cette structure dans laquelle j’étais en sixième, quand je me suis déshabillé, à vrai dire, c’est pour les besoins du livre mais je n’avais pas eu le temps d’enlever le bas, j’avais enlevé simplement le haut. Déjà, c’était assez incongru, c’était en hiver. Donc, je suis resté deux ans dans cette structure-là, parce que ça n’allait pas au-delà. Ensuite, j’ai intégré Sainte Barbe, c’est là où il y avait le cours de méthode Ramain, ce cours où là j’ai eu un gros problème, psychiatrique. Alors que je pensais être quand même un peu normal, je savais que je n’étais plus invisible, je me suis retrouvé avec tous les tarés du Collège Sainte Barbe, un collège qui allait de la sixième jusqu’aux années préparatoires. Je me suis retrouvé dans ce cours où il y avait aussi bien des cinquièmes que des terminales, on était une vingtaine. Tous les élèves avec de gros problèmes psychologiques étaient dans une petite classe, une heure ou deux par semaine. On se retrouvait tous là. Alors que, moi, je m’en sortais, tout à coup j’étais de nouveau replongé dans quelque chose. Donc, je me suis inventé une nouveauté. Avec le recul, je me suis rendu compte que je n’aimais pas la société dans laquelle je vivais. J’aimais beaucoup mes parents, la question ne se posait pas, mais les gens avec qui je me retrouvais n’étaient pas ma famille. Même ma grand-mère maternelle, je ne l’aimais pas trop. Et donc, je me suis inventé : « Bon, je ne suis pas invisible, alors je suis trisomique », puisque quelqu’un m'a dit « Et toi, le mongolien, ça va ? » Dès qu’on me disait une phrase qui pouvait changer le cours de mon destin, je la prenais comme un plaisir. Ça, c’est en analyse que je me suis rendu compte de ça. À chaque fois, il y avait des paroles qui m’arrangeaient bien et, avec ces paroles-là, j’allais décider d’être par exemple trisomique pendant quelques temps.
PL – Ça, c’est très important, c’est-à-dire que c’étaient des paroles qui avaient un point d’impact et qui, pour un temps, déterminaient un personnage de fiction que vous vous inventiez. Vous étiez déjà acteur, quoi ?
FB – Oui, c’est pour ça. J’étais fasciné parce qu’avec mes parents, on allait au cinéma tout le temps, on allait à l’opéra, au théâtre aussi beaucoup. Et moi, jamais, je n’aurais pensé être comédien dans ma vie. Je voulais être médecin. Mais comme j’étais très mauvais en maths et que la physique-chimie, ça ne m’intéressait pas, ça s’est arrêté très vite. Mais comme dit le personnage : « Moi, ce que j’aurais voulu c’est être utile ». Et quand j’ai rencontré le théâtre sur scène, par hasard, d’ailleurs, il se trouve que je me suis dit : « C’est ça que je veux faire. » Donc, j’ai fini mes études de commerce et ensuite, j’ai intégré un groupe de théâtre et j’en ai toujours fait mon métier. J’avais de l’avance par rapport à la concurrence parce que j’ai commencé tôt à rentrer dans la peau de mon personnage. Ce qu’il y a aussi, c’est que moi j’y croyais à ça. Il y avait une espèce de mythomanie incroyable. Je croyais vraiment à mon invisibilité, en me posant des questions : « Pourquoi vois-je mes mains ? C’est parce que je dois avoir des yeux spéciaux… » Je me suis créé un univers de toutes pièces et, quand je joue un personnage, à chaque fois, je me crée des grands-parents, les parents, je construis vraiment toute une famille, et une nouvelle famille à chaque nouveau personnage.
DG – Vous illustrez bien comment, à partir d’une souffrance ou de ce qui peut faire symptôme, vous avez inventé votre façon de savoir-y-faire avec ça. Ça passe très bien et ça fait que vous avez du talent.
PL – C’est pour ça que je voudrais rectifier : ce n’est pas vous qui avez eu de la chance de rencontrer Nicole Garcia, mais plutôt elle.
FB – Peut-être.
PL – Parce que vous avez dû lui offrir une variété de personnages.
FB – Ah oui, c’est sûr ! J’étais avec elle un compagnon…
PL – Idéal ?
FB – Oui, idéal. Parce que je l’aidais un peu dans l’écriture mais, à chaque fois, moi, elle ne m’écoutait pas. Il fallait qu’il y ait une autre parole, pas la mienne.
PL – C’est une vraie femme, alors. Elle ne vous écoutait pas.
FB – Voilà, c’est ça. Une fois, je lui avais offert un livre de Mircea Eliade, un livre magnifique. Et puis, dix ans après, elle me dit : « Oh ! Je viens de lire un livre formidable », le livre formidable que lui avait offert son meilleur ami. Je lui ai dit : « Bah oui ! Je te l’ai offert. » Et elle m’a répondu : « Mais non, tu ne me l’as pas offert. » Alors j’ai dû aller à la bibliothèque, et je lui ai dit : « Tiens, regarde. En tout cas, c’est mon écriture. Voilà, il y a la date. » Et, à chaque fois que je lui disais quelque chose, il fallait que ce soit son ami, avec qui elle travaille, Jacques Seski, qui lui dise : « Si, fais ça. » Quand elle a fait L'Adversaire, ce film avec Daniel Auteuil sur l’affaire Roman, absolument incroyable, cet homme qui a tué toute sa famille qui était un faux médecin, j’avais lu ce fait divers et je lui avais dit : « Ce film, ça peut faire un film extraordinaire », j’avais lu tous les articles possibles là-dessus, comme ancien mythomane, je suis assez ému par tout ce genre de choses… Mais il fallait que ça passe par Jacques Seski, pour qu’elle puisse lire, écouter, que l’autre dise, pour qu’elle me croie. Cette relation n’était donc pas si simple.
PL – C’était peut-être aussi une façon, à son insu, de vous rendre invisible ?
FB – Peut-être. Le livre, je l’ai écrit à la fin, quand on s’est séparés.
DG – Je vous ai entendu parler de vos filles à la radio récemment, de la difficulté de ne pas toujours être disponible pour passer du temps avec elles, et ce petit message de votre compagne actuelle, mère de vos deux filles, qui témoigne que l’une d’elles a dit que ça valait vraiment le coup, votre absence, pour le tournage du film qu’elle a regardé.
FB – Ah oui, j’étais ému quand j’ai entendu ça. Je n’arrivais plus à parler tellement ça m’avait bouleversé. C’est vrai que je fais un métier qui fait qu’on se voit très peu, le dimanche soir, le lundi soir et puis le matin, elles s’en vont tôt, donc c’est un peu difficile mais ça va quand même.
C’est étrange mais vous voyez, à un moment donné, je toussais énormément, c’était en 2019. Durant la tournée où je jouais dans L'Esprit de famille, le fantôme, et que j’allais faire Par le bout du nez, je toussais. C’était le début du Covid, mais j’avais commencé à tousser en 2019. Je téléphone à ma psy en disant : « Est-ce que je peux vous voir pour une séance, est-ce que je peux parler avec vous ? » Et je lui dis : « Voilà, je n’arrête pas de tousser. Je tousse, je tousse, je tousse, je ne sais pas pourquoi, je ne comprends pas. » Et, elle me dit : « Qu'est-ce que vous avez fait d’anormal depuis un an ? » Je lui dis : « Non, je n’ai rien fait d’anormal… Ah si, si ! J’ai un ami qui a eu une leucémie, donc je suis allé le voir à l’hôpital. J’y allais tous les jours, je mettais un masque parce qu’il était en aphasie. Et puis, mon grand ami est mort. Et puis, trois mois après, j’ai eu la mort de mon autre ami avec qui on était toujours, tous les trois, inséparables. » Et elle me dit : « Voilà, vous sortirez de cette séance et vous ne tousserez plus. » Et je dis : « Comment ça ? » – « Oui, vous avez toussé en arrivant, vous ne toussez plus, ça fait une demi-heure que vous êtes là, vous ne toussez plus. Et voilà, c’est fini, vous ne tousserez plus. » Je suis sorti. Je suis allé en répétition et je ne toussais plus. Je l’ai rappelée et je lui ai dit : « Je trouve quand même cela très étrange » et elle m’a dit : « Tousser, c’est expulser quelque chose, et vous avez expulsé la mort, l’angoisse que vous aviez quand vous avez vu votre ami dépérir. Vous aviez un masque, vous enleviez le masque, c’est normal, vous toussiez. Maintenant, cet homme est mort. Votre autre ami est mort et, vous ne toussez plus parce que vous avez expulsé la mort qui était chez vos amis. » Et j’ai arrêté de tousser. J’ai repris la toux en septembre, mais je sais maintenant que c'est l’allergie au chanvre, quand je me pends, dans la pièce La Note. Dès que je me pendais, je toussais, je ne comprenais pas pourquoi, je me suis dit que c’était la peur de mourir, mais il y a une sécurité, donc il n’y a rien à craindre. Je suis allé voir un allergologue, et il m’a demandé si j’avais un rapport avec le chanvre. Je lui ai dit : « Oui, je me pends tous les jours. »
(Rires)
Et je voulais vous dire aussi pourquoi j’ai accepté la pièce. J’ai un ami psychanalyste qui m’a dit : « Non, on est trop amis pour que je te suive. Par contre, quelqu’un serait formidable pour toi. Donc je vais lui téléphoner, et tu vas prendre un rendez-vous avec lui. » Donc, je prends rendez-vous avec lui, et une semaine après, quand je suis arrivé à son cabinet, il y avait des pompiers devant l’immeuble, il s’était jeté par la fenêtre ! Quand j’ai lu la première version de la pièce, avant toutes les coupures, j’ai vu que le psy se pendait, et c’est formidable parce que cette scène des pompiers et moi ensuite qui entre dans l’immeuble, et entend : « Voilà, non, non, le docteur s’est suicidé » m’est revenue.
PL – À vous entendre, à vous voir jouer et avec ce que vous dites maintenant, vous êtes plus un acteur de théâtre qu’un acteur de cinéma. Que vous apporte le théâtre en plus ? Est-ce que c’est la présence du public ? Est-ce que c’est, à chaque fois, remettre l’ouvrage sur le métier ?
FB – Je pense que c’est le travail en amont qui m’intéresse. Au cinéma, c’est assez bizarre. Mais le théâtre, c’est l'art de l’éphémère. On travaille pendant un mois et demi tous les jours, quatre heures, cinq heures, six heures, huit heures par jour, pour que ça commence par cent représentations et puis c’est terminé. Un film, alors qu’il est censé rester dans le patrimoine culturel pendant un, deux ou trois siècles, on ne répète pas. On répète techniquement, mais on ne répète pas les personnages. Chacun va construire son personnage, comme au théâtre, sauf qu’il y a très peu de directeurs d’acteurs dans le cinéma. Il y en a quelques-uns, mais très peu. Le reste, c’est simplement technique, des répétitions techniques et advienne que pourra. En tout cas, en France, c’est comme ça. Je pense qu’aux États-Unis, c’est pareil, j’y ai travaillé. Donc, moi, mon métier, c’est vraiment le théâtre. La différence qu’il y a entre le comédien et l’acteur, c’est qu’un acteur va à peu près jouer toujours de la même façon. Lino Ventura, quand il jouait, il y avait une couleur. Gabin, il y avait une couleur. Vincent Lindon, par exemple maintenant, il n’y a qu’une couleur. Au théâtre, on peut faire pareil, évidemment, mais il y a un moment où on va faire le rôle. L’acteur ne va pas imposer sa personnalité, il va aller, je vais, dans la direction du rôle. Si je dois être mou, je vais jouer un mou, si je dois jouer un nerveux, je vais jouer un nerveux. Mais c’est induit dans le personnage.
PL – Est-ce que ça ne vous rend pas plus visible de façon éphémère, là où le père était absent ?
FB – Ah ! Mais je suis guéri de ça ! La trisomie, un peu… mais je suis guéri de la visibilité de l’invisibilité. Ce qu’il faut savoir aussi, c’est qu’un film, ça reste dans le moule, ça ne bougera jamais, alors qu’une représentation théâtrale, ce ne sera jamais la même et c’est le public qui décide.
DG – À vous rencontrer et à vous écouter, on entend votre amour de la langue. Le théâtre, c’est la langue vivante qui n’est pas figée, un rapport à la langue qui peut se vivre.
FB – Bien sûr. Il y avait ça au cinéma avant, c’était du théâtre filmé le cinéma au début, du cinéma parlant. Puis, on a trouvé une autre façon de le faire. Mais le théâtre, évidemment, c’est toujours la langue. D’ailleurs, c’est très drôle, des réalisateurs de cinéma, comme ça marche moins bien, écrivent une pièce ; ils prennent ce ton ampoulé parce que c’est du théâtre. Et je leur dis : « Mais comme vous n’allez jamais au théâtre, vous ne vous rendez pas compte que le théâtre a évolué aussi ; ce n’est plus Sacha Guitry, ça a bougé. Moi, qui ai eu la chance d’avoir fait du théâtre subventionné pendant vingt-cinq ans, j’ai été confronté soit à des textes du dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècle, les tragédies antiques, Sophocle, et puis j’ai joué aussi du théâtre allemand, un théâtre extrêmement difficile, c’est du quotidien, minimaliste. » Pour vous donner un exemple, dans une pièce, j’étais à table et ma femme faisait la cuisine. On me voyait à table, ça durait deux minutes, trois minutes. La femme arrivait, doucement, lentement, parce que c’était fatigant. Elle amenait une soupe. Et elle disait : « Tiens ». Et puis, elle s’en allait. On avait compris qu’elle avait fini sa soupe déjà depuis longtemps. Et puis, je mangeais ma soupe. Et puis, je finissais ma soupe. Je disais : « J’ai fini ». Elle revenait. Elle prenait le bol. Tout ça, ça durait un quart d'heure. Et j’avais deux répliques. Donc le théâtre, ça peut être ça, et les gens étaient emballés, parce que c’était un univers qu’ils découvraient. C’était un univers qui pouvait exister dans les campagnes où, parfois, les gens ne parlent pas beaucoup. Il y a un sketch extraordinaire de Lafesse qui s'appelle Miss France 1936. Il faut absolument que vous l’écoutiez, rien ne se dit pendant les cinq minutes du coup de téléphone, c’est incroyable.
Je viens d’une famille d’intellos, ma grand-mère maternelle était au Conservatoire de piano, ma grand-mère paternelle a été comédienne, avocate en Russie, mon père était sculpteur, ma mère était chef d’entreprise, elle avait fait Harvard, c’étaient des gens « très haut de gamme ». J’ai donc été confronté au verbe. Mais, j’avais des cousins germains dont les parents avaient loupé leurs études et quand j’allais chez eux, on travaillait à la ferme. Là, il y avait des silences qui duraient des heures et j’étais fasciné par ça. Alors, si les enfants ne parlaient pas à table, là, personne ne parlait. C’est formidable ! Peut-être que Lacan vient de là.
DG – Voilà. Ce sera le mot de la fin. Merci à vous.
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